Réforme du c2i niveau 1 : la massification n’aura pas lieu

La DGESIP, une division du ministère de l’éducation nationale, a entamé une réflexion visant à modifier la certification c2i niveau 1 devenue obsolète et vieillissante.

Cette certification a maintenant 12 ans, le référentiel aurait en effet besoin d’un sacré coup de jeune. Mais ce n’est pas cette voie qui a été choisie par la haute administration, en effet, la nouvelle certification modifiera en profondeur les règles de certification.

Terminées les épreuves pratiques, à la poubelle l’examen théorique, aux orties la relation prof-étudiant, place à la massification, à l’évaluation automatisée de la culture numérique.

Dans un document de cadrage datant de janvier 2016, on en apprend plus sur les intentions de nos énarques et notamment sur un point fondamental : la formation est à distinguer de la certification. Autrement dit, il faudra que l’étudiant s’inscrive à des MOOC déportés au niveau national afin d’acquérir les compétences nécessaires à cette même certification qui s’effectuera automatiquement grâce à des tests automatisés, entre pairs, ou selon d’autres modalités qui sont à définir.

A ce jour on ne connait rien de ces modalités alors que la période de test devrait commencer à la rentrée 2016, donc dans 4 mois. D’ailleurs le calendrier prévisionnel ne semble pas du tout respecté.

En revanche on en sait plus sur le nouveau référentiel, toujours basé sur 5 domaines:

1. Information
Mettre en place une stratégie adaptée de recherche d’information en ligne et organiser une veille d’information en comprenant les spécificités du rapport à l’information dans le monde numérique
2. Communication
Communiquer, collaborer, être présent en ligne et sur les réseaux sociaux en comprenant les effets du numérique sur la dimension collaborative des activités et les enjeux associés pour la société et
pour l’individu (notamment l’identité numérique)
3. Création de contenus
Produire du contenu, le diffuser, réutiliser des contenus existants en connaissant les notions permettant d’appréhender la qualité des documents numériques et en comprenant les principes et
enjeux relatifs au droit d’auteur
4. Protection et sécurité
Utiliser les matériels et services numériques de façon sûr en connaissant la règlementation relative à la protection des données personnelles et les concepts techniques relatifs à la sécurité
informatique, ainsi que les enjeux associés
5. Résolution de problèmes et environnement numérique
Utiliser les moyens numériques pour résoudre des problèmes et répondre à des besoins en connaissant les principes des technologies numériques, l’étendue de leur champ d’application, et les enjeux associés à leur usage, y compris économiques

Chacun des domaines se déclinent en 3 niveaux d’expertise, notés A, B et C. Les rédacteurs de la version de décembre 2015 de ce nouveau référentiel ont su faire preuve de beaucoup d’astuce pour décliner cette répartition tripartite non sans traits de génie au niveau du jargon :

Communication niveau B – enjeux
L’impact de l’ubiquité des données et services sur
les modes de vie.
L’impact des réseaux sociaux sur l’échelle et la
temporalité
du partage de contenu.

Protection et sécurité niveau A – exemple de pratique
Vérifier la présence d’une protection sur son
appareil.

Environnement numérique niveau A – enjeux
La question de la soutenabilité et de l’impact sur
l’environnement.

La lecture du projet de référentiel est, il faut bien l’avouer un peu effrayante si on fait abstraction de la pertinence des objectifs affichés. Tout cela sent bon l’utopie pédagogique.

En tant que formateur c2i niveau 1, on parle bien d’une activité que je pratique à longueur d’année au sein de mon université, le c2i est une faveur offerte aux étudiants désireux de s’inscrire dans un cursus de formation et certification. Dans ma composante, j’ai la chance de disposer de maquettes d’enseignement adaptées aux contenus du c2i actuel, avec l’immense avantage de proposer aux étudiants un suivi pédagogique et technique personnalisé et humain. Sans cet environnement favorable, il n’y aurait AUCUNE certification. Une étudiant de première et de seconde année est un adulte encore un peu ado, il faut l’accompagner et le soutenir.

Ce nouveau c2i est tout le contraire, une formation et une certification centralisées, du numérique et des MOOC partout, point d’humain mais des pairs et des certificateurs automatisés. La Chine et la Corée du Nord sont les deux seuls pays au monde dont le système éducatif  fonctionnent  selon le principe d’hyper-centralisation, peut-être ont-ils servi de modèle ? Nos élites s’imaginent-elles que les étudiants pardon, les apprenants, feront d’eux-même la démarche de s’inscrire dans un cursus leur demandant des efforts supplémentaires, une quantité de travail non quantifiable pour un résultat dont la pertinence et l’intérêt ne sont pas prouvées.

Une autre question reste en suspend, le ministère a-t-il les moyens de ses ambitions ? Car il faut bien l’avouer, pondre un référentiel de 4 pages est une chose, mais mettre en place des logiciels automatisés de certification en est une autre. Mon expérience passée auprès de projets similaires me laissent craindre un résultat au-dessous de toute attente, je pense par exemple à une plate-forme EmaEval.

Pour conclure, si ce projet se fait, je suis prêt à parier sur une baisse drastique du nombre de certifiés : la massification n’aura pas lieu.

Pour en savoir plus :

5 Comments

    • Et en plus ça permet une phase de démarrage et d’expérimentation sans vraiment l’annoncer. Et même de se rater sans que ça ne se voit vraiment.

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  1. La rentrée 2016-2017 se profile, et rien n’apparaît au BO SUR le nouveau C2i. Quels sont les établissements choisis pour l’expérimentation ?

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    • Nos étudiants sont de plus en plus dans le monde du numérique donc on enlève les heures de formations en présentiel. Logique………….

      Répondre

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